Le 24 janvier 1984, Steve Jobs lançait le célèbre Macintosh. En 2013, Apple lui a trouvé des remplaçants qui se nomment iPhone et iPad.
Le Macintosh, icône de l’informatique personnelle, a aujourd’hui 30 ans. Le 24 janvier 1984, Steve Jobs lançait un ordinateur d’un nouveau genre.
Conçu d’un seul bloc compact, accompagné d’une souris et reposant sur une interface simple d’accès, le Mac d’Apple devenait l’un des représentants les plus éminents de l’informatique personnelle.
Trente ans plus tard, le marché des PC est totalement déprimé après avoir connu de très belles années grâce au développement de l’Internet fixe dans le monde.
Mais Apple n’a jamais autant vendu de Mac que ces der-nières années: 15 millions en 2013, cinq fois plus qu’il y a dix ans.
Ce bon vieux Mac est même l’un des rares ordinateurs dont les ventes ne dégringolent pas.
Relancé en 1998 avec l’iMac puis l’iBook, le Mac en a pourtant fini avec les années de croissance folles.
Et c’est Steve Jobs lui-même qui a contribué à tuer son enfant chéri. «Les ordinateurs sont des poids lourds », voués à être supplantés par des modèles plus légers, pro-phétisait le génial patron d’Apple dans une de ses der-nières interviews, en 2010.
Quinze ans plus tôt, il estimait déjà que la guerre du PC était «achevée ». Son constat était sans appel: Apple a «perdu » face à son rival Microsoft et tous les fabricants asiatiques de PC.
Pour Steve Jobs, Apple devrait donc absolument «préparer le prochain truc génial ».
Il a fallu cinq ans à Steve Jobs pour concrétiser ses plans. Ce fut l’iPod en 2001, le baladeur MP3 écoulé par mil-lions. Puis l’iPhone, le premier téléphone intelligent et véritable petit ordinateur de poche, qui embarque une déclinaison du système d’exploitation du Mac, OS X. Et enfin l’iPad, le successeur désigné de l’ordinateur person-nel, qui a lancé la mode des tablettes.
Ces nouveaux produits ont fait basculer le centre de gra-vité de l’entreprise. En 2013, le Mac représentait plus que 10 % du chiffre d’affaires du groupe.
Apple a mis plus de vingt-cinq ans pour vendre 100 millions de Mac. Seulement six ans pour que l’iPod atteigne ce seuil.
Il n’a fallu que trois ans pour l’iPhone et l’iPad.
Pari gagné
Questionné sur l’avenir du Mac, Tim Cook a reconnu que ces succès se faisaient aux dépens de ses ordinateurs. «Notre approche est de ne jamais craindre de cannibaliser nos propres produits, car quelqu’un d’autre trouvera bien le moyen de le faire », a dit le successeur de Steve Jobs.
Apple a gagné ce pari.
Du temps de la splendeur des PC, en 2004, les PC équipés de Windows de Microsoft étaient 56 fois plus vendus que les Macintosh d’Apple, a calculé l’analyse Horace Dediu.
Aujourd’hui, le rapport de forces n’est plus que de 1 à 19. Si l’on additionne les Mac aux terminaux sous système d’exploitation iOS, le rapport entre Microsoft et Apple tombe même en deçà des deux pour un.
Apple ne renonce pourtant pas au Mac.
Sous l’ère Cook, les grandes divisions d’Apple ont fusionné pour encadrer les développements logiciels et matériels, pour Mac comme pour iPhone et iPad. En présentant le Mac Pro, cette machine surpuissante de forme cylindrique, Apple a voulu montrer qu’il pouvait encore innover dans l’informatique.
Il restera toujours un public pour ces «poids lourds».
(http://www.lefigaro.fr/secteur/hightech)
1984», l
Pour promouvoir le Mac, Steve Jobs voulait une publicité «révolutionnaire», qui fut diffusée lors de la finale du Super Bowl en 1984 devant 96 millions de téléspectateurs.
Le premier Macintosh n’a pas seulement marqué l’industrie des nouvelles technologies: il a aussi laissé sa marque dans le monde de la publicité.
Trente ans plus tard, le spot publicitaire qui a pour la première fois présenté le Mac au grand public est autant célébré que l’ordinateur dont il faisait la promotion.
Ce court-métrage d’une minute fut diffusé lors du Super Bowl américain en janvier 1984. La biographie officielle de Steve Jobs, écrite par Walter Isaacson, consacre un chapitre à cet épisode de la vie du créateur d’Apple. «Steve voulait une publicité qui était aussi révolutionnaire et époustouflante que ce qu’il avait créé», explique le journaliste.
Une référence à George Orwell
C’est à Lee Clow, responsable de l’agence de publicité Chiat/Day, et à Ridley Scott, réalisateur du film de science-fiction Blade Runner, qu’incomba cette lourde tâche. Sous la coupe de Jobs, les deux hommes imaginèrent un court-métrage à l’ambiance post-apocalyptique. Des femmes et des hommes, crâne rasé, sont observés par une figure ressemblant à Big Brother, le personnage du roman 1984 de George Orwell.
«Beaucoup de jeunes, surtout ceux qui étaient actifs dans les contre-cultures, voyaient les ordinateurs comme des instruments pouvant être utilisés contre eux par des gouvernements tyranniques», explique Walter Isaacson dans son livre. «Mais à la fin des années 70, on commençait à considérer ces machines comme un outil de puissance personnelle.»
Dans la publicité, une femme – Anya Major, athlète et mannequin anglaise – brise finalement le joug du tyran à l’aide d’un marteau. La publicité s’achève en une phrase choc. «Grâce au Macintosh, vous verrez pourquoi 1984 ne sera pas comme 1984». Dans un élan de modestie propre à Steve Jobs, le Mac est présenté comme le libérateur de tout un peuple.
Une publicité qui a failli ne jamais être diffusée
Pour les besoins du film, Steve Jobs avait débloqué un budget colossal de 750.000 dollars (548.246 euros). Cette dépense a bien failli être vaine.
Lors de la première diffusion privée du film devant le conseil d’administration d’Apple, l’accueil fut glacial. Ses membres firent alors pression sur l’agence de publicité afin qu’elle revende les espaces publicitaires qu’elle avait achetés à prix d’or pour le soir du Super Bowl.
Outré, Steve Jobs envisagea de racheter lui même le temps imparti à sa publicité, afin qu’elle puisse passer à la télévision. Finalement, il n’eut pas besoin de sortir son porte-monnaie. «L’agence avait réussi à revendre le premier spot, de 30 secondes, mais elle a finalement gardé le second long de 60 secondes, dans un acte de défiance», décrit Walter Isaacscon.
«1984» fut finalement diffusé le 22 janvier 1984, devant une audience de 96 millions de téléspectateurs. «Ce soir-là, trois chaînes nationales et 50 chaînes locales ont consacré une partie de leur journal télévisée à cette publicité, donnant au court-métrage une dimension virale inhabituelle dans cette ère pré-Youtube», raconte Walter Isaacson. Le spot fut un succès auprès du public comme auprès des professionnels, remportant le Grand Prix du 31e festival de la publicité Cannes Lion en 1984.
Une nouvelle version remasterisée fut diffusée en 2004, pour célébrer les 20 ans du Macintosh. Clin d’œil au présent, l’héroïne y arbore un iPod à la taille.
Pour son 30e anniversaire, il est peu probable qu’Apple se fende d’une troisième version de son célèbre spot publicitaire à l’occasion du Super Bowl 2014, qui se tiendra le 2 février.
Lee Clow, son co-créateur, a tout de même alimenté les spéculations sur son compte Instagram en y faisant référence à la fois au football américain et au Macintosh. «Du foot. Un coucher de soleil. Mac aura 30 ans cette semaine!» se réjouit-il.
Steve Jobs, par Walter Isaacson, éditions LGF Livre de Poche